mardi 24 novembre 2009

Agrément et publicité des cessions de parts sociales

Cour de cassation 
chambre commerciale 
Audience publique du mardi 24 novembre 2009 
N° de pourvoi: 08-17708 

Non publié au bulletin 



Par cet arrêt non publié, la chambre commerciale précise fort logiquement que la circonstance que la cession de parts sociales d’une société en nom collectif n’a pas reçu l’agrément unanime des associés, comme le veut l’article L. 221-13 du code de commerce, ne peut être invoquée que par la société ou par les associés et non par le cessionnaire.

Tout aussi logiquement, elle énonce (là, à propos de l’art. L. 221-14, texte applicable aussi aux SARL sur renvoi de l’art. L. 223-17) que les formalités de publicité ayant pour objet d’informer les tiers de la cession de parts intervenue, le défaut d’accomplissement de ces formalités ne peut être invoqué par les parties à cet acte.


----------------------

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : 
Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué (Paris, 27 mars 2008), qu'après la mise en liquidation judiciaire de la SNC C2F constructions (la SNC) par jugement du 7 février 2000, M. B... étant désigné liquidateur, M. X... a, en sa qualité d'associé, été mis en redressement puis liquidation judiciaires par jugements des 6 mai 2003 et 1er juin 2004, M. B... étant désigné liquidateur ; que M. X..., contestant sa qualité d'associé, a assigné la Direction nationale d'interventions domaniales, désignée comme administrateur provisoire de la succession de M. Y..., en annulation de la cession de parts sociales intervenue entre M. Y... et lui-même le 30 avril 1992 ; 
Sur le premier moyen : 
Attendu que M. X... et M. Z..., agissant en qualité de mandataire ad hoc de M. X..., font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'intervention volontaire de M. B..., en ses qualités de liquidateur et de représentant des créanciers de la SNC et de M. X..., et d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le moyen : 
1° / que même lorsqu'elle est susceptible d'emporter des conséquences patrimoniales, le caractère personnel de l'action exercée par le débiteur exclut toute intervention du liquidateur aux fins de défense de l'intérêt des créanciers ; qu'en déclarant l'intervention de M. B... recevable quant elle avait elle-même constaté le caractère personnel de l'action de M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 622-9 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause ; 
2° / qu'en ne caractérisant pas en quoi l'action de M. X..., dont elle avait retenu qu'elle était de nature personnelle, était susceptible de porter atteinte à l'intérêt des créanciers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 329 du code de procédure civile ; 
3° / que dans ses conclusions d'appel, M. X... et M. Z... faisaient valoir que l'intervention de M. B..., en sa qualité de liquidateur de la SNC était irrecevable au regard des dispositions de l'article 31 du code de procédure civile, faute d'un lien suffisant entre les liquidations de la SNC et de M. X... ; qu'en déclarant recevable l'action de M. B..., ès qualités de liquidateur de la SNC, sans avoir répondu à ce moyen des conclusions d'appel de M. X..., la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 
Mais attendu qu'ayant relevé que l'action en nullité exercée par M. X... n'était pas seulement patrimoniale et touchait directement à sa personne, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les créanciers représentés par M. B..., en ses qualités de liquidateur de la SNC et de M. X..., sont concernés par cette action qui tend à remettre en cause la qualité d'associé de la SNC de M. X... ; qu'ayant ainsi souverainement apprécié l'intérêt de M. B..., ès qualités, à intervenir à l'instance et répondu en les écartant aux conclusions prétendument omises, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; 
Et sur le second moyen : 
Attendu que M. X... et M. Z..., ès qualités, font encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande tendant à l'annulation de la cession de parts conclue entre M. X... et M. Y... le 30 avril 1992, alors, selon le moyen : 
1° / que la vente de la chose d'autrui est nulle ; qu'en refusant d'annuler la cession de parts du 30 avril 1992 quand elle avait elle-même constaté l'existence d'un acte de cession en date du 16 mai 1991 conclu entre M. Y... et M. A..., ce dont il résultait que celui-ci avait bel et bien cédé à M. X..., le 30 avril 1992, des parts qu'il ne possédait plus pour les avoir d'ores et déjà cédées, le 16 mai 1991, à M. A..., la cour d'appel a violé l'article 1599 du code civil ; 
2° / que constitue un dol le silence observé par l'un des contractants s'il a eu pour conséquence la dissimulation d'un fait qui, s'il avait été connu de l'autre partie, aurait conduit l'autre à ne pas contracter ; qu'en écartant tout dol commis au préjudice de M. X..., sans rechercher si M. X... savait qu'une cession était déjà intervenue entre M. Y... et M. A..., ni si ce fait l'aurait conduit à ne pas contracter, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil ; 
3° / que si l'article L. 235-2 du code de commerce prévoit que l'associé d'une société en nom collectif ne peut se prévaloir à l'encontre des tiers de la nullité résultant de l'absence d'accomplissement des formalités de publicité, ne constitue pas un tiers, au sens de cet article, le cédant auquel est opposé, par le cessionnaire, l'absence d'accomplissement des formalités de publicité relatives à la cession de parts sociales intervenue entre eux ; qu'en rejetant les moyens tirés du défaut d'accomplissement des formalités de publicité au motif que M. X... aurait eu la qualité d'associé, la cour d'appel a violé l'article L. 235-2 du code de commerce ; 
4° / qu'aux termes de l'article L. 221-14 du code de commerce, toute cession de parts sociales doit, d'une part, être signifiée à la société dans les formes prévues par l'article 1690 du code civil ou, à défaut, être portée à la connaissance de celle-ci par le dépôt d'un original de l'acte au siège social contre remise, par le gérant, d'une attestation de ce dépôt et doit, d'autre part, faire l'objet d'une publicité au registre du commerce et des sociétés ; qu'en application de l'article R. 221-9 du code de commerce, la publicité prévue par l'article L. 221-14 dudit code est accomplie par le dépôt en annexe au registre du commerce et des sociétés de deux expéditions de l'acte de cession, s'il a été établi dans la forme authentique, ou de deux originaux, s'il est sous seing privé ; qu'en rejetant le moyen pris du défaut d'accomplissement des formalités de publicité quand elle avait seulement constaté le dépôt au greffe du tribunal de commerce d'un procès-verbal d'assemblée et d'une mise à jour des statuts mentionnant la qualité d'associé de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 221-14, L. 235-2 et R. 221-9 du code de commerce ; 
5° / que la cession de parts sociales intervenue en méconnaissance de l'article L. 221-13 du code de commerce est nulle de plein droit par application de l'article L. 235-1, alinéa 3, dudit code ; qu'en ne recherchant pas si la cession de parts sociales consentie par M. Y... à M. X... était intervenue conformément aux prescriptions de l'article L. 221-13 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de cet article et de l'article L. 235-1 dudit code ; 
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu qu'il ressortait du procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire de la SNC du 30 avril 1992 que M. Y... avait démissionné de sa cogérance à cette date et que M. A...ne figurait pas comme associé, à la différence de M. X..., et relevé que la mise à jour des statuts déposée au greffe du tribunal de commerce mentionnait la qualité d'associé de M. X... à cette même date du 30 avril 1992, ce dont elle a souverainement déduit que l'acte du 16 mai 1991 ne constituait pas une preuve suffisante de la cession de parts au profit de M. A..., c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté le moyen de nullité fondé sur la vente de la chose d'autrui ; 
Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel n'avait pas à faire la recherche visée par la deuxième branche, que ces mêmes constatations rendaient sans objet ; 
Attendu, en troisième lieu, que les formalités de publicité ayant pour objet d'informer les tiers de la cession de parts intervenue, le défaut d'accomplissement de ces formalités ne peut être invoqué par les parties à cet acte ; que dès lors, c'est à bon droit et sans avoir à faire la recherche inopérante visée par la quatrième branche que la cour d'appel a écarté le moyen de nullité invoqué sur ce fondement par M. X... ; 
Et attendu, enfin, que la circonstance que la cession de parts n'a pas reçu l'agrément unanime des associés ne pouvant être invoquée que par la société ou par les associés et non par le cessionnaire, la cour d'appel n'avait pas à faire la recherche inopérante visée par la dernière branche ; 
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; 
PAR CES MOTIFS : 
REJETTE le pourvoi ;