mercredi 20 décembre 2017

96 : La nature juridique du droit de préférence de l’article 1123 du code civil, par M. Bellamallem

La nature juridique du droit de préférence de l’article 1123 du code civil


La doctrine (1) enseigne que le projet de nouvel article 1124 du code civil est contraire aux principes les plus fondamentaux du droit des contrats et, pour tout dire, non conforme à la Constitution.
L'adoption du projet d'article 1124 conduirait à pouvoir forcer la conclusion de la vente promise puisque, aux termes du nouveau texte, « la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis » 
Mme Fabre-Magnan (2) a démontré que la seule définition de la promesse adopté par l'article 1124 suffit cependant à démontrer l'inconstitutionnalité majeure du mécanisme.

Il est, en effet, acquis aujourd'hui que le principe de liberté contractuelle a valeur constitutionnelle. Selon la formule adoptée par le Conseil constitutionnel, il est certes « loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle qui découlent de l'article 4 de la Déclaration de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général », mais « à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » (3). 

Dans ce cadre, Ce qu’a défini le législateur à ce nouvel article 1123 du code civil, ce n'est pas le droit de préférence, c'est un droit de retrait qui permet au bénéficiaire de substituer au tiers dans le contrat conclu. En vertu de cet article le droit de retrait peut avoir comme source la volonté des parties et non le texte législatif.
Le gouvernement affirme que le droit des salariés de préempter l'entreprise est un droit inconstitutionnel ! Pourtant c'est le même gouvernement qui a  plaidé pour que le droit de préférence devient dans le code civil un droit réel donnant au bénéficiaire un droit sur la chose. Pourquoi M. le ministre ne déclare pas, dans ce cas, que le droit de propriété est un droit constitutionnel en France. 
On ne peut pas savoir si le gouvernement est pour la propriété et le principe de la libre cession ou contre. Son position change selon la personne bénéficiaire du droit de la préemption !




Mohammed Bellamallem


-----
1 - Muriel FABRE-MAGNAN, « De l’inconstitutionnalité de l’exécution forcée des promesses unilatérales de vente. Dernière plaidoirie avant adoption du projet de réforme du droit des contrats », Recueil Dalloz, 2015, chron., pp. 826-828
2 -  Muriel FABRE-MAGNAN, op, cit, 

3- Cons. const., 13 juin 2013, n° 2013-672 DC sur la loi relative à la sécurisation de l'emploi, D. 2014. 1516, obs. N. Jacquinot et A. Mangiavillano

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire